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Piotr M. A. Cywinski, Marcin Przeciszewski
L’EGLISE EN POLOGNE APRES 1989 FACE AUX NOUVEAUX DEFIS DE LA DEMOCRATIE (zob: polski przeklad)
Institut Catholique de Paris, X 2004.


La Pologne est non seulement l’un des plus grands pays en Europe au vu de son territoire et du nombre de ses habitants, mais aussi l’un des pays européens ou l’aspect religieux se manifeste de façon particulierement importante. Le catholicisme polonais, bien que considéré en général comme traditionnel et populaire, a subi d’importantes transformation lors de ces dernieres années. La société polonaise est bien celle ou la „foi héritage” est de plus en plus souvent remplacée par la foi relevant d’un choix individuel. Une société pluraliste, phénomene presque inconnu en l’Eglise polonaise, est devenu un nouveau défi, offrant un énorme «marché d’idées», ou le christianisme n’est qu’une proposition parmi d’autres.

1. Institution, évolution, présence.
Gestion d’une victoire morale
Le rôle de l’Eglise dans la chute du communisme, dans la survie de la culture et de l’identité polonaise reste non contestable. Toutefois l’apparition d’institutions publiques, des vecteurs normaux du dialogue social, ainsi que la fin d’un monde polarise entraîna toute la Pologne – Eglise y comprit – dans une redonne des cartes des divers partenaires en présence. La victoire de l’Eglise était bâtie sur un terrain avant tout moral, tres difficile a gérer dans un cadre de démocratie libre, de société de consommation, de pluralisme d’opinion et de comportements éthiques.

Recherche de l’espace publique
Dans ce nouvel espace démocratique l’Eglise avait du mal – au début de la période - a définir sa présence publique. Son rôle face aux medias, sa présence dans les écoles, son influence sur le discours politique, pour ne prendre que ces exemples, devaient etre définis. Le modele d’avant-guerre n’était plus applicable et dans l’apres-guerre toute évolution normale fut rendue impossible par un « couvre feu ecclésiastique » artificiel instaure par le pouvoir. Dans ces décors nouveaux, les années 1989-1996 étaient marquées par des moments de nervosités et de recherche de compromis. Parmi les discours en présence, trois concepts étaient évoqués :
a) L’Eglise est une quasi association privée, son influence sur la Pologne peut mettre en danger les libertés, le minorités, les mécanismes démocratiques (milieux post-communistes, certains milieux athéistes et libéraux);
b) l’Eglise est une donnée fondamentale de la Pologne, elle doit donc participer aux divers dialogues (grande majorité de l’Episcopat, large centre des opinions politiques);
c) la Pologne est de facto catholique, l’Eglise y a donc droit a une influence naturelle et des privileges normaux (extreme droite politique, certains mouvements traditionalistes, Radio Maria).
Sur un large consensus, c’est l’opinion centrale qui fut a la base de la place actuelle de l’Eglise en Pologne.

La convivialité entre croix et banniere
La nonciature apostolique fut reouverte en 1989. Si les principaux acquis dans l’établissement des relations stables entre l’Eglise et l’Etat furent la nouvelle constitution polonaise (1997) et la signature du concordat (1993, ratifie 1998), des domaines restent a définir et reviennent régulierement a l’ordre du jour. Parmi ceux-la est la place parfois favorisée de l’Eglise catholique ou les commodités devant l’impôt dont elle jouit. Toutefois, il faut reconnaître l’établissement stable d’un modele polonais de ces relations, différent de la séparation française, reprenant bien plus volontiers les concepts d’autonomie liée a une coopération structurelle bienveillante des deux parts, sans que les limites des autonomies respectives ne soient atteintes.

Concordat
Le Concordat contient des éléments - standards d’aujourd’hui, qui résultent de la doctrine du Concile Vatican II. „La communauté politique et l’Eglise – comme nous pouvons le lire – sont indépendantes et autonomes, chacune sur son terrain” (art.1 du Concordat). Les deux parties ont reconnu que l’Etat et l’Eglise sont deux unités indépendantes, dont l’une n’est pas subordonnée a l’autre, et dont chacune est régie par des lois qu’elle fixe elle-meme. Indépendamment de cela, le Concordat postule la coopération de l’Etat et de l’Eglise, pour le bien commun.
L’idée conductrice du Concordat est de reconnaître la liberté religieuse de tout individu et des communautés religieuses. Le Concordat garantit en plus les conséquences juridiques d’un mariage religieux, l’ensevelissement des morts non-croyants aux cimetieres catholiques, confirme la libre participation aux cours de catéchese, etc. Au nom de l’autonomie, il garantit a l’Eglise le droit d’exercer librement et publiquement sa mission pastorale et sa juridiction, de créer librement ses structures et de nommer ses fonctionnaires sans intervention du pouvoir laic. Il est important de noter que le Concordat, signé avec l’Eglise catholique, a permis a l’Etat polonais d’établir de nouvelles relations avec d’autres Eglises et communautés confessionnelles. Les solutions adoptées par le Concordat ont servi comme point de repere a la régulation des relations avec d’autres associations confessionnelles.

Constitution
Il est intéressant de signaler que la Constitution Polonaise est la seule en Europe a se référer a Dieu et aux valeurs chrétiennes, tout en respectant la position des non croyants. „Nous, la Nation Polonaise – tous les citoyens de la République Polonaise, autant ceux croyant en Dieu, qui est source de vérité, de justice, de bonté et de beauté, que ceux ne partageant pas cette foi et trouvant ces valeurs a d’autres sources, égaux en droits et devoirs devant le bien commun”. Cette formule a été adoptée par le Parti Populaire Européen en tant que proposition a insérer au Traité Constitutionnel de l’Union Européenne.

Influence traditionnelle et nouvelles présences
En pratique, l’Eglise garde une influence traditionnelle, qu’elle gere par des moyens assez traditionnels (lettres pastorales, communiques, événements de masses). Toutefois certaines nouvelles présences sont notoires, comme l’Agence Catholique d’Information (KAI), véritable réussite médiatique de l’Eglise (feu Mgr Jan Chrapek et Mgr Jozef Zycinski surtout). A cela s’ajoute la présence de l’Eglise dans les événements historiques (entrée dans l’Otan et dans l’Union Européenne), son rôle dans certaines institutions de l’Etat (aumônerie militaire par exemple) et le fort symbolisme patriotique - quasi-étatique - présent lors des grands événements ecclésiastiques, visites pontificales au premier rang.

Bien commun et campagnes d’élections
Si le principe du « bien commun » le remporte de plus en plus dans les discours sur la place de l’Eglise dans l’Etat ou sur son rôle dans les débats politiques en Pologne, lors des campagnes électorales ressurgit sur la scene gauche généralement un langage historique, prônant une défense contre le mythique cléricalisme voir obscurantisme ecclésial. Toutefois, au fil des années ce phénomene s’est amoindri, reste actuellement en vigueur sur les questions de l’IVG ou de la définition de la famille.

Partis politiques chrétiens voir catholiques
Durant les premieres années de la démocratie, il y eut plusieurs tentatives de création de partis déclarés chrétiens, sur la droite et l’extreme droite de la vie politique. Dans les années 90, une part de la hiérarchie avait tendance a supporter ouvertement certains de ces mouvements politiques (ZChN, WAK), ou prôner qu’ « un catholique devait voter pour un catholique ».
Ceci entraîna une polarisation politique d’une part et un malaise chez nombre de catholiques militants ou partisans d’autres options politiques. Depuis l’an 2000, la défaite politique de AWS (coalition de droite quasi-chrétienne) et la montée en extreme de certains groupes affichant en banniere leur catholicisme provoque bien plus de méfiance au sein du clergé devant des groupes politiques se disant chrétiens. Lors de la fondation d’un parti national catholique, au début du millénaire, l’Episcopat s’est clairement distance de cette initiative et a rappelle que le terme de « catholique » est réserve aux organes reconnus par l’Eglise.
La politique de la gauche (SLD) d’apaisement de relations avec l’Eglise, mise en place en vue du referendum européen, ainsi que la perte évidente de tout contrôle de Radio Maria et son aile politique (LPR) par l’Episcopat ont été a la base d’une nouvelle qualité de la coopération entre l’Eglise et les partis traditionnellement peu catholiques. De nos jours, un clair virement pro - chrétien semble s’effectuer dans le parti paysan (PSL).

Aumônerie politique
Tout parti soutenu trop fortement par la hiérarchie subissait un échec relatif lors des élections. Les fideles eux-memes réagissaient de moins en moins positivement aux énoncés politiques entendus dans l’enceinte des églises. En particulier les jeunes, n’ayant souvenance de « l’Eglise du silence » entendait mal des propos politiquement sectaires de la part des représentants ecclésiastiques.
De façon générale les années 90 ont connu une baisse du discours politique dans les sermons et les lettres pastorales. Seuls les groupes extrémistes continuaient a brandir la croix et la banniere, entoures par des pretres qui n’arrivaient pas a concevoir leur présence publique vidée de parti pris politique. Ces groupes restaient relativement visibles lors du referendum constitutionnel (1997) et du referendum européen (2003). Néanmoins, il semble que la tendance des « aumôneries politiques » soit nettement a la baisse.

Habemus papam - Présence et autorité
La personne du pape joue un rôle prédominant en Pologne et l’Eglise polonaise. Tout homme politique essaye de rendre visite au Vatican, le Président de Pologne s’est introduit dans le papamobile (2002), l’opinion de Jean Paul II fut probablement décisive dans le referendum européen. Sa présence est réelle dans toute église, tout presse catholique, toute référence de pensée religieuse.
Le pape jouit d’une tres grande autorité. La maxime : « Roma locuta - causa finita » prend actuellement en Pologne toute son ampleur. Les propres paroles du pape, énoncées a la fin du discours devant l’Assemblée de la République (1999), en témoignent : « Vive le roi, vive le Sénat, vive tous les Etats ». Il trônait en ce moment face a l’Assemblée.
Si le pape est aimé, l’opinion se plait a répéter qu’il est beaucoup moins écouté et entendu par les Polonais. Il est vrai que les albums avec le pape se vendent nettement mieux que ses encycliques, sa poésie mieux que les recueils de ses discours. Il est vrai que deux millions d’enthousiastes peuvent assister a ses messes, sans que la majorité retienne grande chose de ses propos. Depuis 1989 le pape effectua 5 voyages en Pologne, dont le plus long, en 1999, dura deux semaines.

Surcharge théologique
La pensée de Jean Paul II a deja une tres grande influence sur la théologie contemporaine polonaise. Ceci peut surprendre, dans la mesure ou il n’est pas théologien, mais philosophe, et n’est pas thomiste (comme la plupart des écoles polonaises), mais phénoménologue. Toutefois la portée de son autorité s’est manifestée aussi dans la pensée théologique. Grand nombre de réflexions a tendance de chercher appuis a toute these dans les écrits du pape. Certains en sont venus a se demander, si ce phénomene ne risque d’obscurcir a l’avenir une évolution de la pensée théologique.

2. La dynamique de la vie religieuse
Les indices de la foi
La vie religieuse des Polonais n’est pourtant pas libre de paradoxes: la confiance qu’on témoigne généralement a l’Eglise coexiste avec une grande liberté dans la considération des vérités de la foi, et avec un manque d’acceptation des exigences morales, postulées par l’Eglise.
Les indices principaux de l’intensité de la vie religieuse, de la foi et des pratiques, demeurent stables: 92,9% de citoyens polonais se considerent comme croyants, et seulement 2,3% se disent catégoriquement non religieux. Une opinion générale soutenait que l’intense aspect religieux en Pologne était du a la fonction patriotique que l’Eglise exerçait en Pologne a l’époque communiste, devenant une quasi gouvernance indépendante. L’analyse des quinze années de liberté dément cette opinion. La foi des Polonais semble etre un résultat avant tout de la stabilité que la religion a acquise dans la culture polonaise, devenant l’une de ses importantes composantes. 90% de Polonais sont aujourd’hui conscient de leurs liens avec l’Eglise. Pour 12,1% ces liens sont tres proches, pour 43,1% - proches, et pour 34,8 – occasionnels.

Quatre groupes des croyants
Le premier groupe – environ 10% de Polonais – est forme de personnes profondément croyantes, régulierement pratiquantes, et s’identifiant entierement avec l’Eglise et son enseignement.
Le deuxieme groupe - représentant 30-40% de la société - sont des personnes croyantes et régulierement pratiquantes, fortement unies a l’Eglise, mais n’acceptant pas toujours son message moral et social.
Le troisieme groupe, qui constitue 20-25%, sont les personnes croyantes et pratiquantes de façon non réguliere (au moins une fois par mois), pas nécessairement proches de l’Eglise, souvent critiques vis-a-vis de son message social.
Le quatrieme groupe finalement (20-30% des Polonais) sont les personnes croyantes, mais principalement non pratiquantes.

Résistants face a la laicisation
Les Polonais semblent résistants a la laicisation, aussi bien a l’ancienne laicisation totalitaire qu’a la laicisation actuelle, développée par une société libérale et de consommation. Pendant les vingt dernieres années, le niveau de pratiques religieuses en Pologne a baissé de 4% seulement. En 1980, 51% de Polonais participaient a chaque messe dominicale, tandis qu’en 1999, il y avait 46,9% de participants. Ce nombre de personnes allant a l’église, quelque peu diminué, est pourtant accompagné de nombre croissant de fideles profondément croyants et ayant systématiquement recours aux sacrements. Le nombre de personnes communiant a doublé a cette époque, allant de 7,8% en 1980, a 16,3% en 1999. On peut dire que la foi des Polonais murit, relevant de plus en plus souvent d’un choix personnel, et non d’une tradition transmise dans la famille.

Le caractere sélectif de la foi
Le probleme fondamental de la vie religieuse des Polonais est constitué par un phénomene caractérisé comme „sélectivité de la foi”, ou manque d’acceptation a l’égard de certains éléments de l’enseignement de l’Eglise. Bien que 92% de Polonais se disent croyants, 91% croient en l’existence de Dieu, et seulement 69% reconnaissent la vie éternelle. 65,8% de personnes soumises au sondage croient en la résurrection, 72,8% de Polonais reconnaissent l’existence du ciel, mais seulement 31% acceptent l’existence de l’enfer.
L’acceptation de l’enseignement moral de l’Eglise présente également des lacunes. Les normes de l’éthique sexuelle, enseignées par l’Eglise, ne sont pas acceptées par la plupart des catholiques polonais. L’interdiction de la vie sexuelle avant le mariage est reconnue par un tiers de personnes soumises au sondage, et seulement un Polonais sur quatre est d’accord avec l’interdiction de la contraception artificielle.
Cependant, la présence de la foi et de l’Eglise dans la vie publique est entierement acceptée en Pologne: presque 90% de Polonais acceptent la présence des croix dans les lieux publiques, 70% acceptent la présence des pretres a la télévision publique et les interventions de l’Eglise aux sujets moraux et sociaux. Une acceptation générale de l’Eglise s’accroît. A la fin des années 80, cet indice représentait plus de 90%, il a violemment baissé jusqu’a 40% tout au début des années 90, et il remonte systématiquement a partir de 1993, pour représenter actuellement 75%.
Contrairement aux opinions générales, les recherches poursuivies par l’Institut de la Statistique de l’Eglise montrent que 87% de catholiques polonais sont adeptes de la tolérance et de l’oecuménisme, et seul 11% adoptent une attitude d’intolérance.

Paroisses – abris pour mouvements et chancellerie de base ?
Une des données nouvelles semble etre un amoindrissement du rôle des communautés paroissiales. Dans les grandes villes, la participation aux messes ne suit pas nécessairement le découpage paroissial. Les mouvements croissants ne sont pas toujours en relation stable avec des paroisses. De meme, l’entrée de l’enseignement religieux dans les écoles a détaché un peu plus les familles de leur paroisse respective.

Crise de la catéchese classique
Généralement, la catéchese dans les écoles a été favorablement accueillie par la société. La participation des écoliers aux cours de catéchese le prouvent – environ 95 % de participants dans les écoles primaires et environ 80 % de participants dans les écoles secondaires. Meme si, avant l’introduction de la catéchese dans les écoles, certains ont appréhendé des actes d’intolérance qui aurait pu en résulter, les sondages sociologiques ont prouvé que ces appréhensions n’étaient pas fondées. Cet enseignement est destiné uniquement a ceux qui désirent le suivre, tandis que les représentants d’autres confessions peuvent suivre des cours de religion organisés par leurs Eglises.
Apres plus d’une dizaine d’années, il faut reconnaître que le résultat n’est pas excellent :
- les écoliers n’attachent pas une grande attention aux cours de religions – celle-ci ne pouvant décider sur l’admissibilité en classe supérieure ;
- la relation entre catéchiste et parents s’est perdue completement ;
- l’attention des parents pour le contenu de cet enseignement est moindre ;
- la relation avec la paroisse est en baisse ;
- le niveau des catéchistes – en nombre croissant – n’est pas satisfaisant, notamment en matiere de psychologie de l’évolution de l’enfant.
Il en résulte une nécessite de repenser le systeme de catécheses, surtout perceptible au niveau des cours pour adolescents.

Problemes des jeunes
En dépit d’une certaine stabilité de la vie religieuse en Pologne, mentionnée ci-dessus, on peut voir certaines tendances régressives dans le milieu des jeunes. Dans les années 1988-1998, parmi les jeunes soumis aux sondages, le pourcentage de ceux qui se déclaraient comme profondément croyants a baissé de 17,1 a 10,1, tandis que dans le groupe de ceux qui se considéraient comme croyants – il a baissé de 61,8 a 57,7. Le pourcentage de ceux qui se déclaraient comme religieusement indifférents a augmenté de 2,4 a 7,3.
On observe la meme baisse dans le domaine des pratiques religieuses; elle représente 9,4 % dans les années 1988-1998. En ce qui concerne la participation systématique a la messe dominicale, cette baisse est encore plus forte - de 36,6% en 1988 a 23,6 dix ans plus tard. Cette baisse du nombre de jeunes se déclarant croyants est accompagné d’une baisse de pourcentage affirmant éprouver l’expérience de la proximité de Dieu: de 30,4% a 25,2%.

Aumôneries étudiantes
Dans les grandes villes, une des réponses les mieux réussies en Pologne au besoin d’une aumônerie spécialisée sont les aumôneries pour lycéens et étudiants. Les messes sont suivies d’activités communautaires pour éleves et étudiants. Elles attirent souvent des centaines et des centaines de jeunes. Autours de ces eucharisties se développent des groupes, chorales, centres d’intéret, de discussion etc. Taizé et son esprit communautaire eut une influence énorme sur les formes de travail des aumôniers avec les jeunes. Il faut noter aussi ici l’importance des pelerinages, auxquels participent grands nombre de jeunes, meme si les chiffres sont en légere baisse, rien qu’a Jasna Gora, en 2002 plus de 170.000 personnes sont arrivées a pied. Cet essor des mouvements et aumôneries proposées aux jeunes explique en grande partie le nombre de vocations nouvelles dans les grandes villes. C’est un chemin nouveau de découverte de vocation, différent du chemin classique, paroissial, des pretres « d’ancienne date ». Signe d’espoir tres certainement.

Villes/Campagnes – nouvelle définition du paganus ?
Si dans des grands centres, les fideles peuvent choisir la voie chrétienne qui leur convient (choix des messes, des mouvements, des associations), cela n’est pas le cas dans les petites villes et villages, ou il n’existe qu’une église et un pretre. Ici, la situation devient préoccupante. Un des phénomenes visible dans toute la Pologne campagnarde est une baisse sensible de la participation des jeunes au-dela de la premiere communion. Le meme phénomene concerne les milieux ouvriers dans les grandes villes, ou – visiblement – l’Eglise ne parvient pas a trouver un langage approprié.

Les vocations sacerdotales
L’Eglise en Pologne n’est pas aux prises avec la crise des vocations, bien que, depuis dix ans, le pays vit une crise démographique, se dépeuple et vieillit. La Pologne, a côté de l’Ukraine, a le plus grand pourcentage de vocations sacerdotales en Europe. C’est en 1987 qu’on a noté le sommet de vocations, lorsque plus de 9 mille jeunes gens préparaient leur entrée au sacerdoce. Dans les années 1998-2001, il y avait environ 7 mille étudiants dans les séminaires diocésains et monastiques, et il y en a toujours autant, avec une légere tendance a la hausse. Cette année, 1400 jeunes gens ont été admis en premiere année d’études dans les séminaires.
Ce grand nombre de pretres, de séminaristes et de néo-presbyteres fait que l’Eglise catholique en Pologne est l’une des plus jeunes Eglises locales, tandis que la moyenne d’âge d’un pretre oscille entre 45-50 ans. Au total, environ 27 mille pretres travaillent actuellement en Pologne, dont 22 mille pretres diocésains et 5 mille pretres monastiques.
Le grand nombre du clergé facilite les départs en mission, meme si la Pologne n’a pas de forte tradition dans ce domaine. Actuellement, environ 2.000 pretres polonais travaillent en mission dans les pays traditionnels de mission, dont 700 environ dans les pays de l’ancienne Union Soviétique.

Nouveaux mouvements apostoliques
La laicité, dont le rôle particulier fut prôné par les élites catholiques depuis l’entre guerre, s’éveille de maniere plus large en Pologne dans une ambiance fort différente des sociétés occidentales. En effet, ce n’est pas le manque de pretres qui suscite un engagement des laics. Si les laics n’ont pas de grands acces ni a l’administration de l’Eglise, ni aux services du culte, en contre partie se développent des organismes, associations, fondations, mouvements qui dirigent leurs efforts dans l’encadrement des fideles, dans un travail caritatif, éducatif ou social. A noter qu’il n’existe pas de parti chrétien-démocrate ni de syndicats chrétiens proprement dits.
De meme que dans toute l’Europe, en Pologne, ces mouvements deviennent une chance de formation d’une profonde vie religieuse, surtout dans le milieu de jeunes.

Archéologie des mouvements
A la fin des années 40, l’Episcopat polonais, craignant les infiltrations et répressions communistes, a suspendu l’activité de presque toutes associations catholiques. C’est seulement apres 1956 qu’une premiere possibilité de s’associer a été offerte aux catholiques laics, a l’occasion de la fondation de cinq premiers Clubs de l’Intelligentsia Catholique (KIK - actuellement il y en a environ 80). Le mérite de ces milieux n’était pas seulement de former un nombre relativement grand des intellectuels catholiques, mais aussi leur engagement dans l’opposition démocratique. C’est grâce a la présence active de nombreux membres des Clubs de l’Intelligentsia Catholique dans les structures de „Solidarité”, que ce mouvement a acquis une si importante connotation chrétienne.
A partir des années soixante, un phénomene nouveau se développe en Pologne – des communautés apostoliques du laicat, poursuivant leur activité clandestinement ou de façon non officielle jusqu’a 1989. Les premieres d’entre elles, les „Oasis”, fondées par l’abbé Franciszek Blachnicki, se sont ensuite transformées en mouvement „Lumiere et Vie”. La „Famille des Familles”, fondée par le Primat Stefan Wyszynski, a été le deuxieme mouvement du laicat polonais. Les „Familles de Nazareth”, fondées par l’abbé Tadeusz Dajczer en 1985, un mouvement typique polonais du laicat, sont actuellement présentes presque partout dans le monde et rassemblent 40.000 membres.
A la fin des années soixante-dix quelques mouvements formés en Occident, a l’époque du Concile Vatican II, se sont implantés en Pologne: le Renouveau en l’Esprit Saint, la Voie Neocatéchuménale, Focolari, Foi et Lumiere, etc.

Mouvements et inertie du “Géant endormi”
Si les mouvements se développent, le laicat reste – dans son ensemble - relativement peu engagé en associations et mouvements religieux. Les sondages prouvent que seulement un croyant sur dix en fait partie, et seulement un croyant sur vingt se reconnaît comme participant a une telle activité. Le probleme du laicat polonais est celui d’un „géant endormi”, qui devrait seulement se réveiller. Ce probleme est lié a un certain cléricalisme, assez fort et traditionnellement enraciné, a la lumiere duquel la responsabilité de la vie de l’Eglise revient aux clergé, ce qui ne permet pas de mettre en oeuvre l’énergie du laicat. Ceci suscite un autre probleme: les représentants des organisations non-gouvernementales catholiques ne participent que tres peu a la construction de la société civique.
Autant les mouvements laics et associations catholiques, mis en oeuvre a des niveaux inférieurs de l’Eglise, se développent dynamiquement, autant l’Action catholique, réactivée par les autorités supérieures, n’a eu que tres peu de succes. Elle a été érigée par la Conférence de l’Episcopat en 1996. Bien que ses structures aient été fondé dans chaque diocese, ce qui a engagé une grande activité de la part des éveques, l’Action catholique dans tout le pays compte a peine 30 mille membres, en général âgés et peu actifs.

L’Action de charité
C’est un des secteurs des plus dynamiques de l’activité de l’Eglise en Pologne. La structure officielle de ce secteur, „Caritas Polska”, a été créée en 1990, avec des „Caritas” autonomes diocésains (44 détachements). Une large activité charitable est aussi développée par presque tous les ordres religieux (232 postes spécialisés dans le domaine médical et des soins), quelques centaines de fondations a caractere chrétien et de nombreux mouvements apostoliques.
„Caritas” est connue avant tout par ses collectes, telles que l’Oeuvre d’Aide aux Enfants a l’occasion de Noël, qui a permis de cueillir environs 14 millions de zlotys lors des deux dernieres années, et l’Aumône Pascale. Grâce a cette premiere action, quelques dizaines de milliers d’enfants ont pu partir en vacances en été et en hiver. Caritas dirige 100 cantines pour les pauvres et plus de 170 centres de soins pour les pauvres. 60 mille personnes travaillent bénévolement pour Caritas. L’organisation aide également des immigrés, des réfugiés, les victimes des guerres et des cataclysmes dans le monde entier.

Média catholiques
Les média catholiques en Pologne, dans l’une des sociétés les plus catholiques en Europe, sont devenus, sauf quelques exceptions, quasi inexistants. Ceci constitue un grand paradoxe de la III-eme République Polonaise. Les revues catholiques n’ont que 2% de participation au marché. La radio et la télé catholiques ne se présentent guere mieux, en dépit de nombreuses initiatives. Bien qu’il y ait des radios catholiques dans presque touts les dioceses polonais, leur audience dépasse rarement 2-3%. Radio Maria, conservative et pas entierement conforme a la perspective pastorale de l’Eglise, connue dans tout le pays, constitue l’unique exception dans ce domaine. Les média catholiques en Pologne sont trop dispersés, ils manquent de capital extérieur, sont liés aux intérets des dioceses et demeurent concurrents l’un pour l’autre. Parmi les leaders au marché de presse il faut énumérer „Gosc Niedzielny” (Le Visiteur de Dimanche) de Katowice et „Niedziela” (Dimanche) de Czêstochowa, qui sont des hebdomadaires a portée nationale. 3,38% des Polonais lisent „Niedziela”, tandis que „Gosc Niedzielny” est lu par 3,37%. Le tirage de „Tygodnik Powszechny” (Hebdomadaire Universel), ayant un grand mérite dans le domaine de la promotion de la pensée conciliaire, oscille aux environs de 40 mille exemplaires. Parmi les mensuels catholiques, c’est „Rycerz Niepokalanej” (Le Chevalier de l’Immaculée) qui a le plus grand tirage - 180 mille exemplaires. „Znak” (Signe) de Cracovie, „Wiez” (Lien) de Varsovie, et „W Drodze” (En Chemin) de Poznañ”, mensuels de grand mérite, gardent leur place traditionnelle en dépit d’un tirage restreint, vu leur caractere élitiste et intellectuel. L’offre catholique adressée a la jeune génération reste largement insuffisante. Le seul hebdomadaire catholique pour les jeunes est „Droga” (Chemin), publié a Cracovie, dont le tirage est de 40 mille exemplaires. Le développement dynamique de la petite presse paroissiale, atteignant actuellement le nombre de 1000 titres, constitue un nouveau secteur de bonne augure dans ce domaine.
Nous avons mentionne la fondation de l’Agence Catholique de l’Information (KAI) en 1993 qui s’est révélée une initiative médiatique importante. L’Eglise en Pologne intensifie rapidement sa présence dans l’Internet, dont la fondation „Opoka” (La Pierre), s’activant dans ce domaine, constitue la meilleure expression.

3. Diversité, gestion, gouvernance
Premieres différences – issues du passe
Des les premieres années de la Pologne libre, plusieurs intellectuels tenterent de définir l’Eglise en Pologne et de décrire ses diverses composantes. De cette maniere apparurent plusieurs divisions, insistant sur des différences internes perceptibles au sein de l’Eglise. Bien que ces descriptions étaient asses diverses, on peut les résumer – un peu stéréotypiquement - en trois groupes fondamentaux :
1. l’Eglise ouverte, postconciliaire, ocuménique, intellectuelle ;
2. l’Eglise massive, hiérarchique, cultuelle;
3. l ‘Eglise combattante, politique, nationale, dévote.
Il faut voir dans ces divisions, ressenties des les premieres années 90, une évolution libre des diverses conceptions ecclésiologiques et politiques développées pendant la période communiste, voire meme auparavant. Toutefois ces descriptions ne prenaient pas en compte des nouveaux événements influents, comme l’éveil de nouvelles religiosités ou les impacts des aumôneries spécialisées. Il ne semble pas qu’aujourd’hui l’on puisse catégoriser si facilement l’Eglise polonaise, comme cela fut tente dans la moitie des années 90.

Dialogues internes
Apres des fortes tensions au début des années 90, les dialogues internes a l’Eglise se sont développés dans un climat plus calme. Des échanges d’idées entre divers hiérarques, ou autorités influentes au sein d’Eglise, étaient peu a peu, et de moins en moins compris comme des querelles divergentes et destructives, mais comme une présence naturelle d’un dialogue dans une réalité riche en différences. Un grand rôle dans cette compréhension des différences, comme effets d’une richesse interne, doit etre reconnu aux divers mouvements laics, qui ont réussi a coopérer dans des buts concrets, en développant un respect mutuel des identités de chaque mouvement.

L’Eglise apostolique ou l’Eglise défensive
Ce n’est pas tellement la lutte pour la sauvegarde de la foi des Polonais qui constitue le probleme pastoral fondamental au seuil du nouveau millénaire, c’est plus la lutte pour la forme de la vie religieuse en Pologne et pour les attitudes vis-a-vis du monde environnant – autrement dit – c’est la présence des catholiques polonais dans la société pluraliste contemporaine qui constitue le souci fondamental de la pastorale. L’audibilité du message chrétien en Pologne, a l’époque du pluralisme, dépendra non seulement de l’attitude de l’Eglise hiérarchique, mais aussi du style de l’évangélisation, choisi par les milieux des catholiques laics, ceux qui s’identifient le plus avec l’Eglise.
Ces dernieres années nous mettent devant de nombreux points d’interrogation dans ce domaine. Il est notoire que certains milieux catholiques, prônent une „fuite devant la liberté” – vers une sacristie sécurisante, dont il est facile de se défendre contre un monde perçu comme „hostile et antichrétien”. Les représentants de cette option continuent a réaliser le modele de la „politique pastorale défensive”, connu a l’époque totalitaire. La méthode principale de ce milieu est de construire une communauté a la base d’un sentiment d’insécurité et de menace. Radio Marie en est le premier exemple.

Phénomene Radio Maria et branches médiatiques, politique, formative
Structure dans l’Eglise ou en dehors ?
Dans ce contexte d’une Eglise s’ouvrant sur le monde, affichant de plus en plus ouvertement ses différences internes, un groupe apparut au début des années 90, se reconnaissant dans un langage patriotique, défensif, autoritaire, traditionnel, a certains moments nationaliste – celui d’une radio aux mains des peres rédemptoristes de Torun. Radio Maria appartiens a la province polonaise de rédemptoristes (Tadeusz Rydzyk) et n’a pas d’assistant ecclésiastique octroyé par des structures de l’Episcopat.
Un groupe de travail de l’Episcopat sur les problemes d’aumônerie que pose cette radio n’a trouve aucune solution au probleme. La radio reste indépendante de l’Episcopat, joue une image catholique sous le couvert rédemptoriste. La Radio propose d’intenses moments de priere accompagnée d’une propagande d’une vision simplifiée du monde et de mots d’ordres politiques. De ce fait, son rôle politique et social fut a certains moments énorme. Une des premieres créations de la Radio furent la Famille de Radio Maria, rassemblant rapidement des centaines de milliers de fideles. Au moment le plus fort (moitie des années 90), le nombre de personnes restant plus ou moins dans l’orbite de la Radio pouvait s’estimer a 5.000.000. A partir de la seconde moitié des années 90. Radio Maria développa toute une série d’initiatives, qu’elle contrôle actuellement. Elle mis en place un quotidien (Nasz Dziennik), une Ecole Supérieure des Medias, une université du troisieme age, une télévision - satellite (Trwam), des cercles de priere, un parti politique d’extreme droite (Ligue des Familles Polonaises – LPR). Actuellement donc, autours de Radio Maria s’est forme tout un empire financier et politique, dirige par Tadeusz Rydzyk. La convergence de ces moyens lui donnent une position forte dans les plus grands débats polonais. Son langage reste xénophobe, autoritaire et exclusif vis a vis d’un grand nombre de milieux polonais (y compris certains éveques). Le résultat du referendum européen, suite au parti pris de Jean Paul II, fut une défaite cuisante pour Radio Maria. Depuis, il semble que son influence a baisse. Ce groupe reste toutefois actif et présent dans la Pologne actuelle.

Episcopat et Radio Maria
Rares étaient ces éveques, qui soulevaient des les débuts la menace que créait l’existence et le développement de cette Radio. Lorsque sa force s’est avérée énorme, une action décisive n’était probablement plus possible. Tadeusz Rydzyk pour des centaines de milliers de fanatiques avait incomparablement plus d’autorité, que tout l’Episcopat réuni. De plus, certains hiérarques trouvaient a défendre la Radio en argumentant de la qualité des prieres qui y sont offertes. Le probleme amena la Conférence de l’Episcopat a mettre en place un groupe de travail sur la question. Celui-ci s’avéra un échec quasi-total. L’Episcopat n’a aucune influence sur Radio Maria.

Probleme religieux ou politique ?
Radio Maria dans son histoire a entamé plusieurs grandes campagnes, correspondant aux moments les plus importants pour l’établissement d’une Pologne démocratique, libre et stable. Ainsi, Radio Maria était contre l’adoption de la Constitution de la République, Radio Maria était contre l’entrée de la Pologne dans l’OTAN, contre l’entrée dans l’Union Européenne, contre tout gouvernement issu de coalition des partis démocratiques. Au meme moment, certaines voix liées a Radio Maria proposaient en contrepartie une douteuse vision de rapprochement avec « les espaces Slaves qui restent en dehors de l’occident européen ». Alors qu’un éveque catholique était jetté en dehors de la Russie, Radio Maria obtenait des fréquences radio sur une grande partie de l’espace russe.

Oecuménie - Terre frontaliere et culture de coexistence
L’expérience polonaise de la coexistence des religions est fondamentalement différente de celle de la France. Une coexistence pacifique, quasi-complémentaire, est le fruit de toute une pensée politique entamée en Pologne des le moyen age, des l’époque des Jagellons. Il en résulte – par exemple - au cours des siecles une noblesse musulmane ou des autonomies juridiques juives tres importants. Il en résulte aujourd’hui une mutualité respectueuse de l’Etat et de l’Eglise. Il en résulte aussi une longue tradition du dialogue ocuménique et interreligieux.
L’Eglise catholique de Pologne est entré en premiers contacts oecuméniques a la fin des années soixante et au début des années soixante-dix. Une accélération dans ce domaine s’est manifestée a la fin des années quatre-vingt-dix. L’exemple du pape Jean-Paul II a certainement joué un rôle important dans ce domaine.
Fut alors créé une Commission pour le Dialogue de la Conférence de l’Episcopat Polonais et du Conseil Oecuménique Polonais (co-présidée par l’archeveque Alfons Nosol et l’archeveque orthodoxe Jeremiasz. Au sein de la Conférence de l’Episcopat Polonais, en plus du Conseil pour l’Oecuménisme (Commission, dans les années 1974-96), avec l’archeveque Nossol en tete, des groupes ont été mis en place pour un dialogue structurel avec les Eglises orthodoxe, luthérienne, polono-catholique et adventiste, puis des commissions se sont constituées, pour le dialogue avec ces Eglises.
En 2000, l’Eglise catholique et les Eglises – membres du Conseil Oecuménique Polonais (a l’exception des baptistes) ont signé une „Déclaration sur la reconnaissance commune de la validité du bapteme”, ce qui était un grand événement oecuménique.
La publication de la traduction oecuménique du Nouveau Testament et du Livre des Psaumes en 2001 était le deuxieme grand succes oecuménique. Cette traduction était le fruit de six ans de travail, poursuivi par une équipe interconfessionnelle de traducteurs, composée de représentants de 11 Eglises, et fondée par l’Association Biblique en Pologne.
L’aspect théologique du dialogue oecuménique est élaboré dans les écoles supérieures catholiques. En Pologne, il y a trois instituts oecuméniques: a l’Université Catholique de Lublin (l’institut existe depuis 1983, il est dirigé par le pere Waclaw Hryniewicz), a l’Académie Théologique Pontificale de Cracovie (l’institut depuis 1995, est présidé par l’abbé Lukasz Kamykowski), et a l’Université d’Opole (l’institut existe depuis 2000, et est dirigé par l’archeveque Nossol).
Orthodoxie

Une des questions des plus importantes en Pologne actuelle est la perspective du rapprochement entre catholiques et orthodoxes. En Pologne orientale vivent d’importantes minorités orthodoxes – généralement biélorusses et ukrainiennes. Le rôle de l’orthodoxie en Russie, et de la Russie en l’orthodoxie, impose a cet enjeu ocuménique une attention bien particuliere en Pologne. Toutefois, entre ces deux Eglises se trouve coincée l’Eglise uniate, gréco catholique, preuve pour les orthodoxes de l’esprit de conquete de Rome. Cette question est encore plus pesante en Ukraine, partenaire stratégique probablement le plus important pour l’actuelle Pologne.

Le dialogue judéo catholique
Marquée par la seconde guerre mondiale, cette question prend une ampleur toute particuliere en Pologne. Si des milieux catholiques pratiquent des éléments du dialogue et de coopération avec les Juifs de Pologne depuis – au moins – les années soixante, il reste vrai, que d’autres groupes ou personnes n’y voient de grand intéret. Des extrémismes a tendance antisémite assombrissent le tableau. Toutefois il faut remarquer que ce sont les milieux catholiques en Pologne, qui restent les plus ouverts au dialogue avec les Juifs.
Au vu des projets et programmes existant en Pologne, la position de Jean Paul II face au judaisme peut etre mieux comprise, comme un résultat naturel des affinités polono juives historiques, ébranlés sérieusement par l’antisémitisme des années 30 et l’holocauste, mais non disparu entierement.
Le dialogue de l’Eglise catholique en Pologne avec le judaisme, et surtout son caractere théologique, constitue un événement a l’échelle européenne. En 1986 fut fondée une Commission Adjointe de l’Episcopat Polonais pour le Dialogue avec le Judaisme. En 1990, cette commission a préparé la lettre pastorale de l’Episcopat Polonais au sujet des relations catholico juives, base sur l’enseignement du Vatican II.
En 1996, lors des transformations de la structure interne de la Conférence de l’Episcopat Polonais, cette Commission est devenue Comité pour le Dialogue avec le Judaisme, dans le cadre du Conseil pour le Dialogue Religieux. Les deux structures sont présidées par l’archeveque Stanislaw Gadecki – vice-président de la Conférence de l’Episcopat.
Les symposiums et les colloques théologiques, rassemblant des savants chrétiens et juifs, sont devenus l’une des formes importantes du dialogue entre les deux religions. Le premier symposium a été organisé en 1988, dans l’abbaye des bénédictins a Tyniec (Cracovie). Depuis 1989, chaque année, a l’Académie de Théologie Catholique (devenue depuis l’Université Catholique Stefan Wyszyñski), on organise des symposiums internationaux sur „L’Eglise, les Juifs et le judaisme”. L’Institut du Dialogue Catholico Judaique, dirigé par le pere Waldemar Chrostowski, a été fondé dans la meme Université. Cet Institut publie entre autre une collection de livres qui documentent des étapes successives du dialogue.
Le Conseil Polonais des Chrétiens et des Juifs, fondé en 1991, joue un rôle important dans le dialogue qui dépasse le terrain propre du dialogue théologique. Les travaux de ce Conseil sont dirigés par deux co-présidents, Stanislaw Krajewski du côté juif et le pere Michal Czajkowski du côté catholique.
En vertu d’une décision de l’Episcopat Polonais, a partir de 1998 l’Eglise catholique en Pologne célebre la Journée du Judaisme, le 17 janvier, c’est-a-dire a la veille du commencement de la Semaine de Prieres pour l’Unité des Chrétiens. Chaque année, les célébrations centrales ont lieu dans une autre ville de la Pologne. Cette Journée doit permettre aux catholiques de mieux connaître la religion juive et de voir le lien qui l’unit au christianisme. A ce propos, sont organises des discussions théologiques, des offices bibliques, de memes que des prieres communes avec des Juifs.

Le dialogue avec l’islam
Il existe en Pologne environs 5.000 Tatares musulmans, anoblis au XVIIeme siecle et parfaitement intégrés dans la société et la culture polonaise. Apres 1989 arrivent de nouveaux groupes de musulmans, chiites pour la majorité, beaucoup plus intégristes dans bien de cas. Cependant, cela ne crée pas encore de problemes comparables a ce que l’on connaît ailleurs en Europe.
Il est a noter, que la loi française sur l’interdiction des signes d’appartenance religieuse dans les établissements d’enseignement public en France fut considere en Pologne en général comme une fausse solution et une défaite de la République. Une existence non conflictuelle d’une minorité musulmane (de descendance tatare), dans un pays chrétien, constitue une proposition pour l’Europe occidentale, déchirée par des conflits. Toutefois il est a noter que dialogue poursuivi avec ces musulmans ne concerne que des élites.
Un Conseil Commun des Catholiques et des Musulmans fonctionne en Pologne depuis 1997, la seule institution de ce type en Europe. Elle organise des symposiums scientifiques, entreprend des activités caritatives, promulgue des déclarations. L’imam Selim Chazbijewicz et Zdzis³aw Bielecki en sont co-présidents.
Le 26 janvier, jour qui suit la clôture de la Semaine des Prieres pour l’Unité des Chrétiens, l’Eglise catholique en Pologne célebre la Journée de l’Islam.

Catholiques envers l’Europe
Apres 1989, l’Eglise en Pologne s’est retrouvée devant un défi important au niveau des relations avec l’Etat polonais - celui de la prise de position face a l’intégration avec les structures de l’Europe unie. Il convient de rappeler que c’est l’Episcopat polonais, dans son célebre message adressé aux éveques allemands en 1965, qui a inauguré le processus de « la réconciliation au-dela du rideau de fer ».

Définition de l’Europe
La vision de l’Europe présente dans la société polonaise connu une rapide évolution depuis 1989. Terre de libertés et de démocraties, source d’influence et de menaces culturelles, Sodome de libertins et permissivités, exploitant économique, bureaucrates de Bruxelles, tous ces stéréotypes ont pesé lourdement dans le discours chrétien de la compréhension de l’Europe. La réticence française devant la mention des sources chrétiennes de l’Europe n’a fait qu’exacerber ces états d’âme. Longtemps la voix anti-européenne de Radio Maria fut la seule force cohérente et organisée perceptible dans les milieux catholiques.

Choix de l’Europe
Apres 1989, depuis le recouvrement de la liberté, l’Episcopat Polonais appuyait principalement l’orientation proeuropéenne de l’Etat polonais, définie par les gouvernements successifs, indépendamment de leur orientation idéologique.
Le rôle des hiérarques dans ce domaine n’était pas facile, car une part importante de l’opinion catholique ne faisait pas confiance aux idées relatives a l’entrée de la Pologne dans les structures de l’Union Européenne. La visite des 11 éveques polonais a Bruxelles, avec le cardinal Józef Glemp en tete, en novembre 1997, avait une grande importance pour préciser l’attitude de l’Eglise en Pologne par rapport a l’Union Européenne. Suite a cette visite, le Primat de Pologne card. Glemp avait déclaré publiquement que l’intégration de Pologne avec les structures européennes est une seule “issue possible”. C’est l’archeveque Henryk Muszynski, en tant que représentant de la Conférence de l’Episcopat Polonais, qui participera, en observateur, aux travaux de la Commission des Episcopats de la Communauté Européenne.
En meme temps la voix de Jean Paul II se révéla pour nombre de catholiques décisive. Finalement le « pour » le remporta largement. Un rôle non négligeable incombe au Forum Saint Adalbert, qui – a quelques mois avant le referendum - réunit a Gniezno, la premiere capitale de Pologne, berceau de la chrétienté polonaise, des centaines de responsables des divers mouvements chrétiens pour penser ensemble l’avenir de l’Europe et le rôle de la chrétienté. Ce fut le premier grand signal de l’existence massive d’une opinion chrétienne pro - européenne. La lettre pastorale des éveques polonais, proclamée le 2 mai 2003, un mois avant le référendum d’accession, était le document le plus complet de la Conférence de l’Episcopat Polonais au sujet de l’intégration. Elle incitait a prendre part au référendum et a voter en accord avec la conscience. Les éveques ont rappelé la position de Jean-Paul II face a l’intégration a l’UE et ont souligné que l’enseignement du Pape est un indice infaillible pour un croyant. Toutefois, il faut reconnaître que l’Episcopat ne s’est pas prononce d’une maniere aussi tranchante sur la question, que – par exemple – l’Episcopat de la Lituanie.

Mission envers l’Europe
L’Europe a tendance a attendre de la Pologne un sursaut de dynamisme religieux, tout en craignant a la fois, que cette religiosité ne s’avere trop polonaise. Toutefois, cette attente provoqua en Pologne une large réflexion sur la présence de la chrétienté polonaise en Europe.
Ce qui semble poser un probleme a l’état actuel, c’est de préparer les chrétiens polonais a un débat créatif dans le cadre de l’Europe pluraliste. Malheureusement, peu nombreux sont les milieux qui ont entrepris ce travail dans le cadre de l’Eglise. Le plus actif d’entre eux semble le Forum oecuménique de Saint Adalbert, rassemblant quelques dizaines d’organisations catholiques et autres, appartenant a différentes Eglises présentes en Pologne. Ce forum est un important niveau d’intégration du laicat polonais, tandis que les assemblées de Gniezno, organisées chaque année et rassemblant les leaders des organisations catholiques de Pologne et de toute l’Europe centrale et de l’Est, sont devenus un instrument important au service de l’intégration du laicat.
De plus en plus, il en résulte que pour etre en mesure de parler en Europe, la chrétienté polonaise doit savoir se mettre aussi en écoute. La question du préambule a la constitution européenne fut considérée par une grande majorité comme un échec injuste. Comme un compromis traître. Cette question resurgira certainement dans l’avenir. Le modele constitutionnel polonais est - a ce point - considéré unanimement comme beaucoup plus mur et plus réfléchi que celui base sur la tradition française.



Piotr M. A. Cywinski - (1972) Président du Club de l’Intelligentsia Catholique de Varsovie, Président du Forum Saint Adalbert, Président pour l’Europe du Mouvement International des Intellectuels Catholiques „Pax Romana”, Secrétaire Général du Conseil International d’Auschwitz, Membre du Groupe de l’Episcopat aux pourparlers avec l’Eglise gréco catholique d’Ukraine. Marcin Przeciszewski – (1958) Président et Rédacteur en Chef de l’Agence Catholique d’Information. Président de la Fondation pour l’Information Religieuse de la Conférence de l’Episcopat Polonais. Consulteur de la Commission pour le Moyens de la Communication Sociale au sein de l’Episcopat Polonais. Vice-président du Forum Saint Adalbert. Ancien vice coordinateur international du mouvement “Foi et Lumiere”.

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